Une nuit d’octobre, des familles samoanes pataugent dans l’océan avec des filets et des lampes de poche. C’est sept jours après la pleine lune et, juste à temps, le mélange laiteux de vers dans l’eau peu profonde signale que c’est le moment de la récolte des palolos. Hommes, femmes et enfants plongent leurs filets ou leurs mains nues dans l’eau et en ressortent avec de longs fils ressemblant à des spaghettis. Certains peuvent en faire glisser un dans leur bouche, savourant la saveur que beaucoup comparent aux œufs.
Le lendemain, les Samoans organisent des festins pour célébrer leur abondance, faisant frire le palolo avec des œufs, le faisant cuire dans du pain avec du lait de coco et des oignons, ou le saupoudrant simplement sur des toasts. Le ver, qui peut être brun rougeâtre (mâle) ou vert bleuté (femelle), est un mets délicat dans le Pacifique Sud : Les créatures vivant dans le corail ont la saveur salée et poissonneuse des algues ou du caviar couplée à la texture filandreuse des nouilles.
Si vous avez un jour l’occasion de creuser dans un plat de palolo, vous remarquerez peut-être que le ver ne semble pas avoir de tête. C’est parce que sa tête est toujours vivante, saine et sauve, dans son habitat corallien. Le palolo a la rare capacité de se diviser en deux, détachant sa moitié inférieure à chaque saison des amours pour pouvoir flotter à la surface et libérer ses œufs ou son sperme. Ce sont ces « queues » que les chasseurs nocturnes attrapent et font frire.
Alors que son postérieur est dévoré, le reste du palolo vit dans une ignorance béate sous la surface de l’océan. En fait, il est déjà en train de régénérer un nouveau postérieur qui sera prêt à la fin de la semaine.